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Les Corbeaux – Émile Nelligan

    “J’ai cru voir sur mon coeur un essaim de corbeaux
    En pleine lande intime avec des vols funèbres,
    De grands corbeaux venus de montagnes célèbres
    Et qui passaient au clair de lune et de flambeaux.

    Lugubrement, comme en cercle sur des tombeaux
    Et flairant un régal de carcasses de zèbres,
    Ils planaient au frisson glacé de nos ténèbres,
    Agitant à leurs becs une chair en lambeaux.

    Or ,cette proie échue à ces démons des nuits
    N’était autre que ma Vie en loque, aux ennuis
    Vastes qui tournant sur elle ainsi toujours

    Déchirant à larges coups de bec, sans quartier,
    Mon âme, une charogne éparse au champ des jours,
    Que ces vieux corbeaux dévoreront en entier.”